Cette semaine j’ai écrit des lettres.
Mon dernier post sur les réseaux sociaux a été diffusé à une très large audience, sans que je puisse m’expliquer pourquoi. Il y a quelque chose d’ironique à « percer » au moment où l’on part.
Dans ce post j’évoquais ma nostalgie des lettres manuscrites, des correspondants, de l’attente entre chaque lettre et je proposais de recommencer ce lien.
Alors cette semaine j’ai écrit des lettres à ces inconnus qui m’ont spontanément confié leurs adresses et par là même leurs nostalgies.
En traçant les mots avec mon bic quatre couleurs estampillé But, je me suis fait la remarque suivante : là où les réseaux nous poussent à nous distinguer par une esthétique, une palette de couleurs bien étudiée, des polices d’écriture adaptées, n’y a t il pas finalement plus personnel que ces phrases manuscrites ? N’y a t il pas de façon plus directe et en même temps plus complexe de me connaître qu’en parcourant la courbe de mes O, les ligatures des lettres, l’énergie de mes accents ?
Pourtant il n’y a aucune couleur. Juste une écriture noire sur une feuille blanche. Mais une écriture unique, la mienne.
Cela m’a fait repenser au stylo plume. J’ai l’impression, confirmée par des amis enseignants, que plus personne n’en utilise. Hier à la Fnac j’ai fini par en dénicher deux exemplaires, hors de prix.
Moi même je n’en possède plus depuis longtemps. Il y avait pourtant dans ce type de stylo quelque chose de spécifiquement individuel. Vous vous rappelez ? Il fallait « faire » la nouvelle plume à sa main, comme une nouvelle chaussure à son pied. Après quelques jours seulement, le stylo plume faisait corps avec la main qui le tenait. Utiliser le stylo de quelqu’un d’autre était difficile, l’encre ne sortait qu’avec réticence. Encore pire s’il s’agissait du stylo d’un gaucher.
Le stylo avait une durée de vie, celle des cartouches d’encre qu’on y insérait. Parfois au milieu d’un cours il fallait se lancer dans une grande opération chirurgicale, en tendant l’oreille d’autant plus vers le cours qu’il ne fallait pas cesser de suivre.
Et il y avait les effaceurs, qui garantissaient presque une copie propre, sans rature, sans baver comme le tipex.
Tout ceci semble avoir disparu. Une unicité de plus avalée dans la grande normalisation, dans le pratique, dans le jetable comme ce bic But qui vient de rendre l’âme et qu’aucune opération de sauvera de la poubelle.
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